Lors de la rencontre réalisée à Paris les 23 et 24 novembre 2016 par CommonsPolis et Utopia, quelques propositions ont émergé des organisations citoyennes francophones pour nourrir et renforcer l’action des plateformes citoyennes de l’Etat espagnol et développer une démarche munciapliste en France et en Europe francophone.
Des idées d’action:
1. Début Novembre 2016 a eu lieu l’Assemblée des Communs en Europe (150 commoners européens) au Parlement Européen. Proposition : que la prochaine assemblée des communs se tienne dans une « ville du changement », un territoire où des pratiques liées aux communs soient en train d’être fortement mises en place.
2. Imaginer une plateforme commune (alliances, dispositifs, chartes, etc) à créer autour des communs (justice sociale, écologie, connaissance, culture du libre, etc) face aux écheances des élections européennes de 2019.
3. Sur les territoires, constituer des moments de rencontre reguliers non pas pour écouter ou dialoguer mais pour réaliser concrètement ensemble un projet sur un commun: agir sur un parc, aller squatter un immeuble, etc.
4. Sur les chartes des communs et autour des pratiques, échanger des expériences sur la gestion de ces communs.
5. Developper le budger participatif localisé à un territoire.
6. Approfondir le débat autour du rôle et la place de l’administration publique par rapport aux organisations politiques pour éviter les confusions.
7. Encourager le développement et l’ouverture des espaces d’autogestion ensemble de la part des municipalités pour qu’ils soient pris en charge par les mouvements sociaux.
8. Par rapport à la feminisation de la politique: sortir les dirigeants politiques, les élus, de leur zone de confort, pour qu’ils se confrontent concrètement aux autres.
9. Développer et promouvoir une boite à outils autour de la problématique du changement climatique dirigée aux municipalités (cf. Alternatiba).
10. Pour perpetuer les moyens d’agir sur la transition, les municipalités citoyennes devraient constituer un Fonds citoyen municipal (cf. fonds de participation citoyenne de #Pas Sans Nous).
Quelles perspectives de travail pour renforcer en Europe l’alternative municipaliste ?
En fin d’après midi, avant de clore l’ensemble la journée, les participants ont pu échanger sur la viabilité de la démarche municipaliste en France et en Europe ainsi qu’ébaucher quelques pistes pour une mise en place d’une telle démarche. En voici quelques extraits :
Saisir les opportunités pour construire un horizon à moyen terme. Il ne faudrait pas tomber dans l’immédiateté de vouloir changer les choses en fonction d’un agenda politique marqué par des échéances présidentielles. Il faut développer le terreau sur lequel vont venir se bâtir nos alternatives. Et cela prend du temps. La perspective 2020 avec les municipales paraît être un bon horizon et il faudra savoir se mouvoir dans un contexte détermine par le fait qu’en juin 2017 on aura une droite dure et décomplexée au pouvoir qui s’est donné 100 jours pour appliquer son programme anti-reforme avant de devenir impopulaire. Deux scénarios possibles : soit on sera écrasés « à la Tatcher » ou alors on pourra se ressaisir pour s’unir sur des perspectives communes. Nous on va travailler sur la boîte à outils et les questions programmatiques. En octobre 2018, nous ressemblerons toutes les expériences alternatives (climat, territoire, etc) qui sont menées dans une approche inter-communale. Il faudra donc chercher à faire converger ceux qui sont sur cette démarche et ceux qui essayent de s’investir le champ politique pour identifier les acteurs, construire une feuille de route et saisir les opportunités pour les faire aller sur le long terme. (Txetx Etcheverry).
Le code éthique : un instrument indispensable à construire. La difficulté en France est de mobiliser les gens sur autre chose que les partis, autrement que derrière quelqu’un? Il faut de-construire une culture politique qui n’apporte que vedettariat et corruption. La démarche de code éthique est dans ce sens fondamentale. Ne pas partir seulement par des idées mais sur des nouvelles règles de jeu. (Gaëlle Krikorian)
Deux leviers : lien Paris – Provinces et lien avec les jeunes. L’échange et le croisement des dynamiques est essentiel. Les villes sont déjà prises par ceux qui n’ont pas le pouvoir. Il y a des énergies qui ont déjà lieu. Lumière et espoir doivent être notre cap plutôt que la crise et le désespoir. A ce niveau là il faut travailler en priorité sur deux enjeux: lien Paris – Provinces et lien avec les jeunes. (Vincent Liegey)
Dead-lines possibles vers 2020: Eté 2017, autour du renouvellement de la symbolique de la Résistance. 50 ans de mai 68 pour recontextualiser / moderniser cette rupture.2019 enjeux des élections européennes.2020 enjeu des élections municipales. (Olivier Consolo)
Il faudrait se doter de moyens pour accompagner les gens de la société civile à se former à des futures responsabilités politiques. Mais on manque d’outils de nature politique dans le milieu associatif français. Pourrait on créer une école populaire pour préparer les nouveaux leaders à ces futurs enjeux ? Renforcer les relations entre l’urbain et le rural (36.000 communes en France dont un tiers des communes européennes). Travailler avec les élus qui font du bon travail et qui ont une forte légitimité sur leur territoire.
Validation de l’espace de dialogues comme #commonspolis. Les milieux institutionnels politiques sont des vrais freins à l’expérimentation de pratiques politiques. La transition est en marche, elle va être dure, il faudra laisser la place à la radicalité des jeunes et trouver un équilibre dans la diversité des approches en construisant des espaces comme #commonspolis pour apprendre les uns des autres. (Vincent Liegey).
Ces rencontres #commonspolis sont essentielles. Il faut structurer un réseau de villes rebelles en réfléchissant à un code éthique internationaliste de toutes ces villes. (J Rossiaud).
En France il existe une tendance à trop politiser les choses et cela casse les initiatives réelles des gens. La méthodologie du code éthique peut être un très bon instrument pour construire le mouvement municipaliste en France. Avec une méthodologie on peut mobiliser les gens (cf. Alternatiba et ses 110 expériences). (Nicolas Krausz)
Il faudrait mieux refléter dans nos réunions le caractère multiculturel de nos sociétés. En Espagne, ils ont su créer des dispositifs qui permettent de redonner la parole aux gens dans un contexte de crise. En France, il faudrait faire en sorte que les gens retrouvent un nouvel espace de militantisme (Michel Genet)
Leadership et code éthique. Il est vrai qu’en Espagne la crise économique s’est combiné à une crise de régime. Mais l’extrême droite est en train de lire certains aspects de la crise politique que nous ne savons pas lire. L’exercice de la responsabilité politique est complexe et ne nécessite pas énormément de préparation. Les leaderships en Espagne individuels et collectifs sont surgis spontanément. Ce que nous devons faire c’est de savoir identifier ces leaderships naturels qui surgissent dans les processus pour apprendre à les construire et les gérer collectivement. Il ne s’agit pas tellement de former des nouveaux cadres mais d’apprendre à accompagner collectivement ces leaderships. Le code éthique a été le premier instrument pour développer la confluence: au delà de nos différences idéologiques et avant de mettre en œuvre certaines politiques il fallait mettre en œuvre une nouvelle forme de faire de la politique, car pour nous le changement des formes avait un réel contenu politique. Le processus a consisté à reconnaître les principes d’éthique politique de nos mouvements et avec ces prototypes nous avons dialogué pour construire un consensus. Le code éthique est le résultat de ce processus de confluence.
Construire constamment un vote populaire d’identification avec notre projet. A Barcelone, nous avons gagné les élections au mois de mai. Nous avons été très fortement votés par les secteurs populaires. En septembre, aux les élections catalanes, BcnenComú ne s’est pas présentée. Nous avons pu nous rendre compte de la dualité du vote. La coalition catalane a eu des résultats calamiteux, les mêmes quartiers qui avaient voté pour nous ont voté pour la droite populiste de Ciudadanos. C’est une des raisons qui nous a obligé à nous présenter aux élections générales. Dans une crise de régime, les identification politiques se cassent. Il faut reconstruire ces processus de re-identification politique avec les citoyens constamment. Il faut de-idéaliser la situation, accepter que nous sommes en dispute pour un vote populaire de des-identification avec le régime politique. (Marcelo Expósito)
Il faut comprendre pourquoi l’électorat populaire est si mobile, chercher les raisons de cela. Comment vais-je aller à l’encontre des gens avec qui je n’aurais jamais eu l’idée d’adresser la parole ? Comment discuter du changement au quotidien? Il faut partir des choses très concrètes: la soupe à faire avec les voisins, etc. (Jean Rossiaud)
Promouvoir les espaces d’autogestion collective. La situation de crise qui était au cœur du 15M était plus qu’une crise économique mais une crise de régime structurelle apportant une perte de référents politiques à droite comme à gauche. Il faut laisser aussi une grande place à la construction de l’autogestion collective sans trop vouloir les normer. (Diego Jímenez)
Renforcer les espaces d’échange d’expérience pour gagner le combat culturel. Il faut continuer à avoir des espaces d’échanges pour décoloniser notre vision de la politique. Dès qu’on discute de notre rapport à la politique il est formaté par le fait que l’Etat institutionnalise les mouvements sociaux. (Jean Rossiaud)
Ces plateformes doivent nous permettre de décoloniser nos imaginaires mais aussi la « metropolisation » de nos identités culturelles de perception. Il faut aller discuter avec des gens qui sont à coté de chez nous. Replonger dans les territoires pour créer des espaces de confiance, d’écoute et de dialogue. (Vincent Liegey )
Nos sociétés sont extrêmement fragmentées ou seulement certains peuvent s’en sortir ; les enjeux culturels sont de long terme. il faut regagner ce combat culturel. (Olivier Consolo)
Les mouvements de transition citoyenne en Belgique semblent se ressembler avec l’expérience des plates-formes espagnoles. Il faut savoir se reconnecter avec ces dynamiques. Le combat culturel est aussi à mener individuellement: arrêter de-croire qu’on arrivera avec des plateformes et des orientations toutes faites, avec des chemins pré-établis. Il faut de-idéaliser notre chemin, assumer le bricolage et se mettre au service de la saisie d’opportunités. Il faut faire le deuil de vouloir sauver le monde. (Julien Didier)